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Marguerite, Céline, et Roland

chaton sous acides, part II
Peut-être vois-je en ce chat une métaphore de la prépa… Ou pas.

Marguerite, Céline, et Roland,*  ou l’article qui vous dira tout sur les joies, les désespoir, et tout le reste, de la prépa. Littéraire, qui plus est.
J’ai longtemps voulu écrire sur la prépa, mais j’ai toujours trouvé que je manquais de recul par rapport à tout ça. Aujourd’hui, ça fait presque deux ans que j’en suis « sortie » (ça sonne un peu cure de désintox, hein)… et j’ai décidé d’en faire profiter le net. Pour changer de mon cercle de proches. (spéciale kassdédi)

La prépa. Ca sonnait glorieux en terminale. En terminale, j’avais une obsession: mes notes. Et par conséquent, j’avais une seconde obsession: mon dossier. Oui, moi non plus, je n’aurais pas voulu me rencontrer en terminale.
Ce fameux dossier envoyé, c’est là que commence l’histoire – comme celle de beaucoup d’autres « prépateux », vous vous en apercevrez (ou vous vous en êtes déjà aperçu): « Je ne savais pas quoi faire, donc j’ai fait une prépa. »
Et puis donc, après un bac obtenu généralement avec mention (je n’ai croisé PERSONNE en prépa sans mention au bac), vous débarquez, tout joyeux et tout effrayé, un beau matin, dans un lycée – peut-être loin de chez vous, peut-être dans la même ville… Mais qui vous paraît bien loin des « années lycées » et de leur supposée décontraction.
Tout le monde s’échange des regards plus ou moins craintifs. Tout le monde s’attend plus ou moins à croiser des bilingues latins, des rats de bibliothèques, sortis pour l’occasion.
Mais que nenni. On s’aperçoit rapidement que les gens sont « normaux », qu’ils sont aussi flippés que vous, que des têtes ont l’air vraiment sympas, et que tout ça, finalement, ça ne fait pas trop trop peur.
Le discours du proviseur, quoiqu’un peu alarmiste (« On ne redouble pas sa première année ! » « Le concours ! » « Il faut travailler ! » « Soyez les meilleurs ! »), ne vous alarme pas plus que ça: travailler, vous aimez assez.

L’année d’hypokhâgne commence donc tranquillement. On se prête rapidement au jeu des dissertations en-veux-tu-en-voilà, des khôlles si terrifiantes au début (« Euuuuuh…. *balbutiement-rougissement*… Alors euuuuh, Stendhaaaaal… »), des devoirs qui n’en finissent plus. On se sent un peu noyé, puis on apprend vite que la clé, c’est l’organisation, et on semble tout maîtriser. Ou, en tous cas, on fait tout pour bien faire !
Ce que j’ai retenu de cette année d’hypokhâgne, ce ne sont pas les discours parfois un peu brutaux des profs (« C’est nul. »), ni la pression permanente que j’avais sur les épaules… L’hypokhâgne, je l’associe avant tout au plaisir. Au plaisir d’apprendre sans arrêt. De sortir de cours et d’avoir l’impression d’être en capacité de rédiger une thèse sur l’importance des fourmis au Moyen-Age. Le plaisir d’écouter ces professeurs, véritables puits de sciences, souvent passionnés par leur matière. Le plaisir de se sentir poussée à aller plus loin. Le plaisir de rencontrer de véritables amis qui ne sont, certes, pas tout à fait normaux, mais qui sont néanmoins très appréciés en temps de crise hypokhâgneuse. (car il y en a, autant le dire)
Aussi vite que l’éclair, la fin de l’année arrive. Le second concours blanc laisse maussade. On préfère ne pas trop y penser. On jette un coup d’oeil, l’air de rien, aux formations proposées à la fac (pourtant récusée par l’ensemble des professeurs), « au cas où ».  Et puis le conseil de classe, ça y est, la khâgne.
Le tourbillon  reprend, peut-être dans un établissement différent, mais avec une pression supplémentaire, et plus menaçante: celle du concours. Y arrivera, y arrivera pas ? Qu’est ce qu’on fait après ? Autant de questions inévitables, mais à mon sens utiles. Il faut se perdre un peu pour arriver à retomber sur ses pieds.
Après une année qu’on passe -il faut bien le dire- coupés de tout, et de toute réalité opérationnelle (stage ? job ?), on arrive au concours. On donne tout ce qu’on peut – pas trop le choix.
On attend, patiemment. On est surpris, heureux, ou désolés (ou les trois à la fois). Mais c’est fini. Pour de bon.

Mon histoire personnelle a mis en avant quelque chose de fort désagréable: les effets secondaires de la prépa peuvent être assez forts. Et peuvent durer assez longtemps. L’impression de ne pas savoir où on est, ce qu’on fait, ce qu’on devient, comme ça, sans travail. (Faute, peut-être, à un passage en khâgne dans un meilleur lycée)
Mais on retombe sur ses pieds. On reprend la vie normalement, c’est-à-dire équilibrée: on fait du sport, on sort régulièrement, on rencontre de nouvelles têtes. Et même si des regrets peuvent venir effleurer notre délicat cerveau de temps à autres, on est heureux de l’avoir fait, d’en être sortis, et d’avoir pu disserter sur des choses inimaginables.

* NB: Marguerite = Marguerite Duras, Céline = Louis-Ferdinand Céline, Roland= Roland Barthes. J’aurais pu aussi mettre Pascal, pour Pascal Dandrey, et Louis, pour Louis Aragon. J’aurais aussi pu faire une liste de lectures, note.

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